Vin biologique | aucune approche n’est universelle

Jane Masters MW est la Master of Wine d’Opimian

 

En tant qu’amateurs de vin, nous voulons de bons vins qui s’inscrivent dans un mode de vie sain. Les viticulteurs, eux, veulent prendre soin de la terre qu’ils cultivent, protéger leur terroir contre les effets des produits chimiques et encourager la biodiversité. Ce ne sont là que quelques-unes des raisons pour lesquelles les vins biologiques sont de plus en plus populaires. Mais ces bonnes intentions sont-elles à la hauteur ?

 

Dans les années 1970, les viticulteurs ont commencé à réaliser les effets négatifs que l’utilisation d’une grande quantité de produits agrochimiques avait sur leurs sols. En réaction, la philosophie de base de l’agriculture biologique a éliminé l’utilisation de produits agrochimiques comme les pesticides, herbicides, fongicides et engrais chimiques dans les vignobles. Je souligne le mot « agrochimique », car il serait faux de dire que l’agriculture biologique n’utilise aucun produit chimique. Il est presque impossible de produire des raisins de qualité sans employer de traitements.

 

En fonction de sa géographie et de son climat, chaque région viticole présente des types de vermine et de maladies différentes, ce qui fait que l’agriculture biologique est plus facile à pratiquer dans certaines régions, notamment celles où le climat est chaud et sec. Toutefois, les deux maladies fongiques les plus courantes et les plus problématiques dans la plupart des régions sont le mildiou et l’oïdium. Ces deux maladies doivent être traitées pour obtenir une récolte de bonne qualité et d’une quantité suffisante. En viticulture biologique, des pulvérisations à base de cuivre sont utilisées contre le mildiou et du soufre est appliqué à intervalles réguliers dans le vignoble pour atténuer l’oïdium. Il n’existe pas de normes internationales pour la viticulture biologique.

 

Il existe de nombreux organismes comme Agriculture Biologique en France et le NOP (National Organic Program) géré par l’USDA, aux États-Unis, et chacun stipule des règles et des règlements légèrement différents. Toutes ces règles permettent l’utilisation de traitements à base de cuivre et de soufre, dans certaines limites, à condition qu’il s’agisse d’éléments naturels plutôt que de composés synthétiques produits de manière industrielle. Mais naturel ne signifie pas nécessairement inoffensif; prenez l’arsenic par exemple. L’un des problèmes est qu’avec le temps, le cuivre peut s’accumuler dans le sol jusqu’à atteindre des niveaux toxiques, ce qui nuit à la biodiversité. En Allemagne, l’utilisation de phosphite dans la viticulture biologique pour remplacer le cuivre est autorisée; en France, Agriculture Biologique interdit cette pratique.

 

 

Les vins ont un niveau de complexité supplémentaire comparativement aux fruits et légumes biologiques, car les raisins fermentent pour donner du vin. Il existe une distinction entre les vins issus de raisins dits biologiques et les vins produits de manière biologique. Les certifications de vin biologique tiennent compte de facteurs comme les levures et la quantité de dioxyde de soufre qui peut être utilisée pour protéger les vins contre l’oxydation et la détérioration. Dans le passé, la faible utilisation de dioxyde de soufre (voire l’absence d’utilisation de cette matière) dans le processus de vinification menait à la production de vins au mauvais goût. Les vins biologiques étaient synonymes de vins de mauvaise qualité. Aujourd’hui, les vignerons bio sont beaucoup plus habiles.

 

Dans un climat humide comme celui de Bordeaux, où la pression du mildiou peut être élevée, le régime de pulvérisation en viticulture biologique peut nécessiter deux fois plus de passages de tracteurs dans le vignoble, ce qui a pour effet de comprimer le sol et d’augmenter l’empreinte carbone du vignoble par l’utilisation accrue de diesel. Les produits agrochimiques ont également une empreinte carbone importante en raison des émissions produites par leur production industrielle, leur distribution et leur livraison au vignoble.

 

De nos jours, les viticulteurs et les vignerons doivent tenir compte de nombreux facteurs. Il n’existe pas d’approche universelle. Les vignerons suivent une philosophie durable
et doivent réagir aux conditions que la nature leur impose. Certains choisiront l’approche biologique, mais celle-ci ne convient pas à tous. L’objectif doit toujours être de produire les meilleurs vins possible.